Devenir « bon » à moto, ce n’est pas juste de la connaissance. La théorie, ça aide, mais ce n’est qu’une (petite) partie de la maîtrise. Ce qui compte vraiment à moto, c’est la pratique, en quantité et en qualité. L’entraînement en conditions réelles crée la compétence. Si je fais le bilan après (un peu plus de) 20 ans de moto, voici ce que j’ai appris.

Publication en décembre 2024

Contexte

Cet article est une sorte de « bilan de compétences », une prise de recul à peu près à mi-chemin de ma carrière motarde que je partage afin qu’elle vous soit utile et vous aide à prioriser ce qui est important.

En 2025, cela fera pas loin de 25 ans (à quelques mois près) que j’ai commencé à rouler à moto. Si Dieu me prête vie, si la vie me permet de rester en bonne santé, si mes efforts pour rester en bonne forme (pas de tabac, pas d’alcool, pas de café, peu de sucres, une alimentation bio et une activité physique régulière) paient… j’espère pouvoir rouler encore 20 à 25 ans.

En près de 25 ans de moto, j’ai roulé sur à peu près tout ce qui fonctionne avec deux roues et un moteur, de 50 à 2300 cm3, sur tous les types de motos et même de scooters, thermiques et électriques. J’ai roulé dans à peu près tous les pays d’Europe occidentale et centrale, un peu en Afrique (du Nord et subsaharienne), sur tous types de routes et de chemins, à toutes les altitudes, par tous les temps, de -15°C à +45°C, en solo comme en duo, en groupe de 2 à 90 motos… J’approche le million de kilomètres parcourus à moto et je suis toujours en vie. Je n’ai même jamais subi d’accident grave : à mes yeux, c’est mon plus grand titre de gloire.

Je suis un motard « de route », et non un « sportif ». J’ai certes pratiqué (et pratique encore à l’occasion) le circuit, l’enduro, le trial, le rallye routier, la rando tout-terrain… Mais toujours en amateur, à mon petit niveau, sans faire de compétition. Je ne suis champion de rien.

Surtout, j’ai enseigné à des milliers d’élèves et de stagiaires, de tous âges, de tous profils, partout en France mais aussi à l’étranger, aussi bien en formation initiale qu’en perfectionnement.
J’ai moi-même appris auprès d’instructeurs civils comme militaires, de moniteurs moto en formation initiale et en perfectionnement, en France, Suisse et Belgique, de gendarmes du CNFSR à Fontainebleau, de policiers de l’ex-école moto de la préfecture de police à Chevilly-Larue et du CNFM-PN à Sens, d’un ancien instructeur de l’école des brigades motocyclistes à La Rochelle, d’éducateurs sportifs de vitesse et d’enduro, d’un moniteur de trial, d’autres motards amateurs plus expérimentés que moi…

Dans les quelque 295 (à ce jour) autres articles sur ce site, j’explique tout le côté technique de la conduite de sécurité, je vous donne des informations pour choisir votre équipement et entretenir votre machine, ainsi que des conseils pour préparer votre permis moto, je vous informe sur vos droits et devoirs en tant que motards usagers de la route, je vous incite à réfléchir sur votre pratique motarde…

OK, mais au final, qu’est-ce qui compte ?
Quels enseignements tire un motard expérimenté de son expérience, justement ?

Ne pas croire que c’est facile

Bien trop de gens pensent que « la moto c’est facile » !
A peu près autant que ceux qui croient que « la moto c’est dangereux », d’ailleurs…
Ce n’est ni l’un, ni l’autre.

C’est toujours facile de voir faire quelqu’un qui sait faire.
Cela donne l’impression que c’est faisable, voire simple. Et là, on essaie et… on s’aperçoit que c’est bien plus exigeant que ce qu’on croyait.

Bien rouler à moto en toutes circonstances demande de la pratique, de la vigilance, une bonne coordination psycho-motrice, un minimum de connaissances en physique, en biologie, en anatomie, en mécanique, en droit de la circulation routière, en socio-psychologie…

Savoir s’en sortir dans des situations difficiles, surtout quand on ne peut pas se reposer sur la seule force physique et qu’il faut mettre en oeuvre des techniques spécifiques, demande de l’entraînement, de la répétition, de la motivation, du travail personnel, parfois de la musculation (surtout du dos, des jambes, des abdominaux).

Ce que j’ai appris, ce que je sais faire maintenant, m’a demandé énormément de temps et d’énergie.
Sachant que je suis parti de zéro et que j’ai commencé la moto assez tard dans ma vie (à 25 ans), croyez-moi quand je vous dis qu’il m’a fallu beaucoup d’efforts.

Lire
« La moto, c’est pas pour moi… »
Savoir si on est un motard débutant (ou pas)
Mes gadins, mes gamelles, mes emmerdes…

Bref, la théorie, la lecture sur papier ou sur écran, les vidéos en ligne… c’est bien, ça donne des bases.
Mais ce qui compte, c’est la pratique !
Non seulement il ne faut pas se contenter de lire ou de visionner pour savoir faire, mais il ne suffit pas d’assister à un stage ou de suivre un cours pour savoir faire facilement, pour automatiser, pour savoir pratiquer n’importe où, n’importe quand, sans perdre de temps à réfléchir.
Ne croyez pas que ça va venir tout seul !

Pour chaque technique, il faut répéter, « driller », automatiser.
Et ça prend du temps, c’est exigeant, ça demande de l’énergie, ça peut coûter des sous, surtout quand on se rate et que la moto tombe…
Il ne suffit pas se réussir un exercice une fois. Il faut le réussir à tous les coups, plusieurs fois d’affilée (au moins 3-4), de préférence dans différentes configurations, pour commencer à se dire que c’est acquis.

Et en plus, il faut se maintenir à jour, garder le niveau.
Même quand vous maîtrisez bien une technique, si vous ne la pratiquez pas régulièrement, vous allez subir une déperdition de compétence. Les Ricains disent : « if you don’t use it, you lose it« .
La moto, ce n’est pas comme le vélo, contrairement à ce qu’on entend souvent. La maîtrise technique à moto, ça s’oublie, ça se périme ! Ce n’est pas parce que vous avez le permis depuis 10, 20 ou 30 ans que vous savez faire.
Croyez-moi, j’ai connu des centaines de stagiaires en reprise de guidon, qui avaient arrêté pendant six mois, un an, dix ans, 20 ans… Le record : 35 ans d’arrêt de pratique. Je peux vous dire qu’on repart presque de zéro.

C’est pour ça que la meilleure solution est d’adhérer à une antenne de la CASIM pour aller s’entraîner régulièrement, toute l’année.
C’est motivant de ne pas rester seuls, d’aller retrouver d’autres motards qui vont devenir des copains, voire des amis, parce que ça se fait dans un cadre bénévole, bienveillant, encadré, sécurisé, avec des gens qui vont vous conseiller, vous aider, vous empêcher de vous faire mal ou de faire tomber votre moto, qui peuvent vous prêter une moto d’entraînement protégée…
Hélas, ce n’est pas possible partout.

Sinon, il faut prendre le temps et la peine d’aller s’exercer seul ou avec des amis, ne serait-ce que 15 à 30 minutes par semaine, dans un endroit sécurisé.
Là aussi, c’est contraignant.

Le poids et la taille de la moto ne comptent pas (ou peu)

Beaucoup de motardes et de motards pensent qu’il faut absolument poser les deux pieds à plat au sol pour pouvoir tenir une moto.
Bien sûr, ça aide, mais ce n’est pas nécessaire !

Ce qui compte avant tout n’est pas le poids, mais l’emplacement du centre de gravité de la machine.
Ce qui passe avant la hauteur de selle est la maîtrise du point d’équilibre.

Plus la moto est haute et lourde, plus c’est compliqué. Mais pas impossible.
Cela demande juste plus de maîtrise, donc de compétence, donc d’entraînement.

De toute façon, à partir de 20 km/h, le poids disparaît sous l’action de l’effet gyroscopique des roues.
Entre 7-8 et 20 km/h, avec un peu de technique et de mobilité du corps (contrepoids), il est aisé de contrôler la stabilité de la moto.
La difficulté se pose à moins de 7-8 km/h et surtout quand on veut tourner serré à moins de 5 km/h.
Mais encore une fois, c’est fondamentalement une question de maîtrise technique.

Il faut accepter de prendre du temps pour apprendre ces techniques spécifiques, remettre en question ce qui pouvait paraître « naturel », apprendre à gérer l’équilibre avec un seul pied au sol, ne pas hésiter à descendre de selle pour les manoeuvres à très basse vitesse…
Oui, c’est exigeant, mais c’est possible, utile et fructueux !

Lire

La qualité compte plus que la quantité

Le nombre d’années de permis moto ne fait pas la compétence au guidon, loin de là…
Le nombre de kilomètres parcourus compte bien plus, mais n’est pas non plus à lui seul un indicateur pertinent. Le motard qui fait 40.000 km par an parce qu’il effectue un trajet quotidien de 100 km aller et 100 km retour, uniquement sur autoroute et voie rapide, sera très compétent sur ce trajet précis… mais ne connaît pas le monde en dehors de ce trajet ou de ce type de routes !

Il existe une large palette de pratiques de la moto : circuit d’endurance ou de vitesse, moto-cross, enduro, rando verte, trial (indoor et outdoor), rallye routier, rallye-raid, voyage au long cours, stunt, gymkhana, moto-ball…

Il existe une vaste gamme de machines : roadsters, routières, sportives, customs, trails, enduros, cross, scooters à deux ou trois roues, side-cars, trikes, mini-motos, dirt bikes…
De toutes cylindrées, avec boîte de vitesses manuelle ou automatique, simple ou double embrayage, moteur thermique ou électrique, transmission par chaîne, courroie ou arbre…

Il existe une immense variété d’environnements : divers types de routes, avec et sans revêtement, de largeurs de voie, de densités de trafic, de conditions climatiques, de saisons, de jour comme de nuit…

Celui qui dit qu’il a tout vu tout connu à moto est un menteur.
Une vie entière dédiée à la moto n’y suffirait pas.

Mais certains peuvent s’en approcher !
Ou au moins se donner la peine de se remettre en question et de varier leurs pratiques.
Plus vous essayez des pratiques différentes, avec des machines différentes, dans des environnements différents… plus vous apprenez, plus vous serez à l’aise.

Vous apprendrez aussi à vous adapter, à de multiples niveaux !
Vous apprendrez à vous endurcir, à supporter le froid (à cause du refroidissement éolien), à lutter contre l’ankylose, à identifier les équipements qui vous conviennent le mieux en fonction des conditions de roulage et de la durée du trajet.

Alors, on est d’accord : il faut un minimum de « quantité » pour s’améliorer.
En-dessous de 5.000 ou 10.000 km annuels, vous maintenez tout juste votre niveau. A mes yeux, il faut rouler au moins 10.000, plutôt 20.000 km par an (voire plus), pour vraiment progresser.
Mais c’est surtout la qualité de ces kilomètres qui fait la différence : la variété des environnements et des conditions, la diversité d’équipements et de machines… et plus encore, différents types de pratique.

Faites au moins un stage par an : un cours, une formation, un baptême, une initiation…
Au moins sur une journée (ou deux demi-journées) ou un week-end.
Que ce soit dans une pratique que vous ne connaissez pas ou pour approfondir un domaine de conduite que vous connaissez déjà.
Que ce soit avec votre machine ou une moto de location.
En cours individuel ou collectif, en solo ou duo, seul, ou avec votre conjoint ou avec des potes.
Acceptez d’y consacrer du temps et éventuellement un peu d’argent (entre 10 et 500 euros la journée).

Ne cessez jamais d’apprendre, de découvrir, de vous mettre en question, de vous entraîner, de rester ouverts à d’autres techniques que celles que vous maîtrisez.

Lire :

Savoir s’adapter au véhicule

Un cliché, une expression un peu générique qui recouvre de multiples aspects…

Tout d’abord, il faut oublier (presque) toutes vos habitudes d’automobiliste !
Et plus longue est votre expérience au volant, plus ce sera difficile de vous adapter quand vous passez à un guidon.
Rouler à moto n’a (presque) rien à voir avec la voiture, que ce soit en termes de placement sur la route, de trajectoires en virages, de gestion de l’allure, de position du corps, de placement de regard, de gestion des autres véhicules…

S’agissant de ce que je connais le mieux, les longs trajets à moto ne se vivent pas du tout comme en voiture.
A moto, on fatigue plus vite à cause de la concentration bien sûr, mais aussi du fait du vent qui engendre froid et bruit. Il faut s’arrêter plus souvent pour souffler, mais aussi pour faire le plein.
A l’inverse, il est plus facile de bouger sur la moto pour se détendre les muscles et éviter l’ankylose. Encore faut-il oser le faire et savoir le faire.

Lire

Le temps de trajet se gère différemment.
Si vous partez à moto et que vous vous équipez sérieusement, il faut compter 5 à 10 minutes pour vous équiper au départ et autant pour vous déséquiper à l’arrivée, un peu moins longtemps pour enlever et remettre une partie de cet équipement lors des arrêts, pauses et étapes. De ce fait, les trajets courts (moins de 15 à 30 minutes) n’ont pas grand intérêt à moto, sauf pour la facilité de stationnement ou si vous pouvez circuler en interfile aux heures de pointe.

Sur long trajet, quand vous parcourez plusieurs centaines de kilomètres par jour à moto, c’est encore différent. Ne vous fiez pas à la durée annoncée par votre GPS ou un logiciel de navigation ! Les algorithmes de calcul de temps de trajet sont calibrés pour la voiture, non pour la moto. Ils ne tiennent pas compte des pauses nécessaires et à moto, on s’arrête plus souvent (fatigue, réservoir plus petit). Pour tenir le temps de trajet annoncé, il faut rouler en excès de vitesse : ça fatigue plus, c’est plus dangereux et ça peut coûter cher. Alors laissez-vous le temps, comptez de 20 à 30% de temps en plus…

Par ailleurs, la moto est moins bien adaptée aux conditions extrêmes.
Il m’arrive de faire de longs trajets à moto sous forte pluie, ou de nuit, ou dans un brouillard dense, ou sous la neige… Oui, ça m’arrive, en général parce que je n’ai pas le choix (pour le boulot) ou parce que les intempéries arrivent en cours de trajet.
Mais si j’ai le choix, j’évite ! Parce qu’il m’est aussi arrivé de rester bloqué par la neige pendant 24 ou 48 heures. Parce que même si j’arrive à destination trempé et glacé jusqu’aux os, je n’aime pas souffrir et que j’ai passé l’âge de ces c…ries !
Et en cas de verglas, je ne discute même pas : je reporte le trajet ou je loue une voiture.

L’équipement de la moto et du motard joue un rôle majeur.
En voiture, vous pouvez être habillés à peu près comme vous voulez. A moto, l’équipement motard et les accessoires de la moto sont votre carrosserie, donc votre protection à tout point de vue : contre la résistance de l’air, le bruit, le refroidissement éolien, les intempéries (pluie, nuit, brouillard, neige)…
En voiture, vous avez la climatisation et le chauffage. A moto, c’est l’équipement qui joue.
Sauf que quand vous avez 30-35°C l’été en fond de vallée et 5-10°C au col à 2.000 mètres d’altitude, c’est compliqué ! Même au printemps, quand il fait doux en ville ou en bord de mer, vous pouvez avoir encore de la neige en haute montagne. Il faut avoir un équipement capable de s’adapter, ne pas hésiter à jouer sur différentes couches, disposer d’une bagagerie (souple ou rigide) pour y entrrposer ce que vous ne mettez pas…
C’est contraignant et il faut le prévoir.

Lire

La protection contre le bruit du vent est essentielle.
Portez des protections auditives sur tout trajet de plus de 30 minutes !
Lire Se protéger du bruit à moto

Investir dans un équipement de qualité

Là aussi, j’enfonce une porte ouverte… mais on ne se rend pas toujours compte à quel point c’est important, surtout quand on débute et qu’on n’y connaît pas grand-chose.
Je croise pas mal de motards débutants qui ne perçoivent pas l’immense variété des équipements moto et qui pensent que, tant que c’est commercialisé par un équipementier moto, « bah… c’est que ça doit être bien ! »

Il y a de tout (et pas mal de n’importe quoi) dans l’équipement motard.
Je sais qu’il est difficile de s’y retrouver, que le prix ne fait pas tout, qu’il n’existe (hélas) pas de label de qualité.
Dans d’autres grands pays européens, il existe une vraie presse moto de qualité, avec notamment les magazines britannique Ride Magazine et allemand Touren Fahrer qui réalisent chaque année de gros dossiers sur les équipements pour chaque saison, avec des recommandations éclairées, fondées sur de vrais essais au long cours.
En France hélas… à part Motomag, et encore plus beaucoup et à une bien plus petite échelle.

Pas besoin d’y dépenser des sommes gigantesques !
Il est parfaitement possible de bien s’équiper pour pas trop cher, en s’informant, en évitant les achats d’impulsion, en ne cédant pas au « coup de coeur » sur des critères uniquement esthétiques, en privilégiant la seconde main, en négociant les prix (oui, c’est possible, comme dans tout commerce d’habillement), en faisant jouer la concurrence, en anticipant ses achats pour profiter des promotions, des soldes, des déstockages…
Bref, pour économiser de l’argent, il faut accepter d’y consacrer du temps !

Lire

Si vous roulez « sérieusement », équipez-vous sérieusement !

Lire

Savoir qui écouter

Là, c’est vraiment délicat et compliqué…
Dans le monde moto, 95% des motards (surtout masculins) sont persuadés d’être « bons » et se sentent obligés de le montrer, voire d’en persuader les autres, surtout quand les autres sont débutants (donc crédules) et encore plus quand les autres sont des femmes.
C’est comme ça, c’est humain !

La moto relève souvent de la passion, beaucoup de motards y investissent du temps, de l’argent, de l’énergie…
Résultat, ils y appliquent ce que j’appelle une « projection d’identité » et définissent leur personne en tant que « pratiquant moto », passionné de moto. Comme si le fait de se dire « passionné » créait la compétence au guidon et plus encore, la compétence dans la transmission du savoir qu’ils pensent détenir.

Savoir faire pour soi-même est une chose.
Savoir adapter sa technique pour le plus grand nombre est déjà plus difficile.
Savoir expliquer, démontrer, transmettre efficacement est bien plus dificile.

Hélas, je ne compte même plus le nombre de motards que j’ai entendus / lus raconter des inepties qui peuvent parfois mettre en danger ceux qui y croient.
Lire

Y compris (parfois) des professionnels de la moto : commerciaux en concession, mécanos, policiers, gendarmes, moto-taxis, vendeurs en magasin d’équipement, journalistes spécialisés…

Y compris même (mais c’est plus rare) des pros de la formation : moniteurs moto (beaucoup), instructeurs en école d’administration, éducateurs sportifs, « coachs » auto-proclamés, anciens compétiteurs et champions de tout poil…

Dans ces conditions, qui croire ?
Je n’ai pas de recette ou de solution-miracle.
Dans ce domaine, j’applique les mêmes méthodes que celles de l’investigation journalistique que j’ai apprises dans mon autre métier :

  • ne jamais se contenter d’une seule source, ne pas croire un témoignage unique
  • recouper différentes sources
  • qualifier les sources selon leur degré de crédibilité
  • poser des questions, ne pas se contenter de ce que les gens veulent bien dire d’eux-mêmes
  • vérifier par moi-même, essayer, expérimenter
  • tenir compte des biais cognitifs et des éléments d’altération d’un témoignage
  • questionner les motivations de la personne, vérifier si elle n’a pas un intérêt personnel à partager ses conseils
  • relativiser les conseils qui peuvent s’avérer valables dans une situation (pour un type de machines, par exemple, ou un profil de personnes, ou certains environnements), mais pas partout, ni tout le temps

Je me demande toujours : « qu’est-ce qui ça lui apporte de me dire ça ? »
Rares sont les gens qui partagent totalement gratuitement.
Même moi ici, je le fais parce que ça me fait plaisir de rendre service (gratification personenlle), que ça ne me coûte rien (à part du temps) et aussi parce que cela peut motiver certaines personnes à me contacter pour un stage ou à acheter mes livres.

Autre question que je me pose : « est-ce que cette personne sait de quoi elle parle POUR MOI ? »
Des motards qui s’en sortent pas mal, vous en verrez plein. Leurs techniques fonctionnent pour eux, pour leur morphologie, avec leur moto, pour leur expérience, pour l’environnement auquel ils sont habitués.
Cela ne veut pas forcément dire que ce sera efficace pour vous, pour vos besoins, avec vos contraintes.
Est-ce qu’au moins, ces personnes se sont posés la question de vos particularités ?
Est-ce qu’elles les connaissent, voire les partagent ?

Bref, ne pas rester passif, ne pas croire bêtement, ne pas accorder crédit par défaut, surtout face à un argument d’autorité.
Exercez votre esprit critique !
Mais cela reste compliqué, j’en suis bien conscient.

Développer la culture du risque

Là encore, c’est complexe, long et nuancé.
Le postulat fondamental est d’arrêter de se plaindre du comportement des autres et de mettre en place par vous-mêmes les mesures adéquates pour vous protéger, sans attendre que d’autres le fassent à votre place.

Je cite ce que j’ai déjà écrit ailleurs :

Un point fondamental : il faut bien comprendre et admettre que la sécurité représente toujours une contrainte.
Quel que soit le domaine, dans l’industrie, le transport aérien, l’informatique, le nucléaire, la circulation routière… la sécurité entraîne toujours des contraintes et souvent une perte de temps.
La sécurité, ce sont des consignes à suivre, des procédures à respecter, des précautions à prendre. Cela suppose forcément de ne pas faire comme on veut, quand on veut, où on veut…
La sécurité, c’est de la contrainte, donc de la frustration, donc un moindre plaisir, donc une perte de liberté perçue.
Tout ça pour diminuer ou éviter un risque qui n’a que peu de chances de se réaliser.
La sécurité, c’est toujours une contrainte qui semble inutile.
Jusqu’au jour où…

La sécurité, c’est une culture.
Certains l’ont, d’autres pas. Dans tous les cas, c’est de l’acquis, pas de l’inné. Ceux qui la possèdent l’ont apprise.
Changer d’attitude suppose de se remettre en question, ce que très peu d’êtres humains acceptent et parviennent à faire, surtout quand il s’agit de motards qui existent à travers la moto et veulent donner / garder une image d’eux-mêmes virile / jeune.

Très peu de motards (mais de plus en plus, quand même) admettent ou arrivent à comprendre qu’acquérir une bonne maîtrise technique, de l’aisance, afin de l’appliquer à une conduite fondée sur la sécurité, n’enlève rien au plaisir de pratiquer la moto.
Au contraire !
Bien mise en pratique, acquise et maîtrisée au point de devenir un automatisme, la conduite de sécurité augmente le plaisir de conduite.

Toute la difficulté est d’accepter d’en passer par la phase d’apprentissage, d’acquisition, d’assimilation.
Ce qui suppose déjà, au départ, une prise de conscience, l’acceptation que l’on n’est pas toujours « au top », du moins pas autant que souhaité.
Puis développer la motivation pour accepter de consacrer du temps (éventuellement de l’argent) à se perfectionner, au lieu d’aller se balader.
Enfin, trouver la détermination nécessaire pour sortir de sa « zone de confort », faire des efforts, parfois risquer de faire tomber sa machine…

Au final, ce n’est qu’une question de priorité, donc de motivation.

Je vous renvoie vers mes différents articles autour de ce thème :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.