On le sentait venir depuis quelques semaines : l’absence d’éthylotest valide dans son véhicule ne sera pas sanctionnée. Il reste recommandé d’en avoir un à portée de main, mais la présence à bord de tous les véhicules terrestres à moteur en circulation (sauf les cyclos) n’est plus obligatoire. Chronique d’un échec annoncé, surtout concernant les motos.

Cet article est destiné à essayer d’analyser l’échec de ce qui aurait pu constituer une bonne idée pour faire progresser la sécurité routière.

Mise à jour en janvier 2018 : alors que le fait de ne pas avoir un éthylotest dans sa voiture n’était pas ou plus sanctionné, le comité interministériel de sécurité routière du 9 janvier 2018 prévoit la fin de l’obligation de la détention d’un éthylotest pour 2018.
Le décret du 28 février 2012 devrait donc être abrogé en 2018.
Le gouvernement d’Edouard Philippe préconise d’autres moyens plus pertinents pour mettre à la disposition des conducteurs des éthylotests jugés plus fiables.
Il est prévu notamment de généraliser la vente d’éthylotests à proximité des rayons de boissons alcoolisées dans tous les établissements de boissons à emporter.

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Précisons d’emblée les choses car il règne une certaine confusion dans le discours médiatique.
L’obligation de garder « à portée de main » un éthylotest dans son véhicule n’est pas abrogée, ni même suspendue. C’est la verbalisation de l’absence de ce dispositif qui est reportée « sine die », aux calendes grecques, à une date indéterminée… en attendant les conclusions sur cette mesure du Conseil national de la sécurité routière (CNSR) et une décision ministérielle.

En fait, c’est toujours obligatoire, mais comme l’absence n’est pas sanctionnée, ce n’est pas vraiment obligatoire !

Comment en est-on arrivé à une telle salade ?

Le 30 novembre 2011, le président de la République alors en exercice annonce que la présence d’un éthylotest deviendra obligatoire dans « chaque véhicule terrestre à moteur à l’exception des cyclomoteurs » afin de lutter contre l’alcool au volant.
L’usager peut en théorie choisir entre le modèle électronique (réutilisable) et le chimique (jetable), les deux devant répondre à la norme NF.

Le 9 décembre 2011, le conseil interministériel de sécurité routière émet un avis détaillant les modalités de mise en oeuvre de cette décision présidentielle, prise sans concertation, sans étude d’impact, sans préparation.

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Le 1er mars 2012, le décret n° 2012-284 du 28 février 2012 paraît au Journal Officiel.

Ce décret n’est pas anodin car il modifie le Code de la Route en y ajoutant un nouvel article R.234-7.
Ce décret reste en vigueur, il n’a pas été abrogé.
Il concerne également les véhicules de tourisme et utilitaires de société ou utilisés pour un usage professionnel.

Il oblige tout conducteur d’un véhicule à posséder un éthylotest non usagé, « disponible immédiatement ». L’éthylotest doit satisfaire aux conditions de validité, notamment sa date de péremption, prévues par le fabricant. Et ce, à partir du 1er juillet 2012.

Le texte sépare bien la notion d’obligation de possession et de sanction en cas de non-respect de cette réglementation. Il prévoit une verbalisation avec sanction à partir du 1er novembre 2012, quatre mois après l’entrée en vigueur de l’obligation de possession.

La sanction immédiate prévoit une contravention de première classe (amende de 11 euros) en cas de non-présentation d’un éthylotest aux forces de l’ordre, avec obligation de présenter dans les cinq jours l’élément nécessaire, sous peine d’une amende de quatrième classe (forfaitaire à 90 euros, minorée à 68 euros, majorée à 135 euros), sans perte de points.

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Le 9 octobre 2012, le ministre de l’Intérieur annonce sa décision de reporter à mars 2013, « compte tenu des difficultés d’approvisionnement recensées dans certaines régions », le contrôle de l’obligation de détention d’un éthylotest et, le cas échéant, la sanction pour défaut de présentation.

A noter que ce communiqué a été publié 20 jours avant la signature du décret et seulement six jours après l’avis rendu par le groupe interministériel permanent de la sécurité routière…

Un communiqué de la Sécurité Routière explique à l’époque que Manuel Valls a pris cette décision afin de « permettre à l’ensemble des conducteurs de s’équiper dans de bonnes conditions et à un juste prix ».

La mesure a en effet soulevé une vague d’hostilité.
Dès le début, les associations d’usagers et de victimes de la route se disent sceptiques, certaines raillant une «mesurette».
Au mois de mars 2012, François Hollande, alors candidat en campagne électorale, juge dans un courrier envoyé aux associations cette obligation «pas toujours adaptée» car «la grande majorité des accidents est le fait de conducteurs qui savent être au-dessus de la limite légale».
Les automobilistes étrangers s’insurgent contre l’obligation d’investir dans un éthylotest de norme NF, donc produit en France. En août 2012, l’Automobile Club et la Sécurité routière du Luxembourg estiment que le dispositif n’est pas conforme à la législation européenne et envoient une lettre au président François Hollande.
En septembre 2012, un élu de Haute-Garonne écrit au ministère de l’Intérieur pour lui faire part des difficultés liées à la pénurie d’alccotests dans le commerce.

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Le 30 octobre 2012, le décret n°2012-1197 du 29 octobre paraît au Journal Officiel.
Il reporte au 1er mars 2013 l’entrée en vigueur de la sanction du défaut de possession d’un éthylotest par le conducteur.

Explication officielle : « Ce délai supplémentaire de quatre mois doit permettre aux forces de police et de gendarmerie de continuer à sensibiliser les conducteurs et à les informer de leurs obligations. »

En réalité, le comité interministériel de la sécurité routière annonce déjà la couleur : « le délai de report sera l’occasion d’évaluer l’intérêt du dispositif de détention obligatoire d’un éthylotest, en lien étroit avec le conseil national de la sécurité routière et les associations d’usagers et de victimes de la route. »

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Le 24 janvier 2013, le ministre de l’Intérieur annonce un report sine die de l’obligation d’avoir un éthylotest dans les voitures.

Cette décision, annoncée sans attendre l’avis du Conseil national de sécurité routière (prévu pour le mois suivant de février) augure d’un abandon pur et simple de la mesure.

« Ces éthylotests sont inutiles car une grande majorité des accidents avec présence d’alcool sont le fait de taux supérieurs à 1,2 g », déclarait à « Sud Ouest », en juillet 2012, Chantal Perrichon, présidente de la Ligue contre la violence routière.
Son discours n’a pas changé : « Ces appareils ne sont pas fiables car ils sont sensibles à la chaleur et au froid, dangereux en cas de projection d’un tube cassé et difficiles à recycler. »

« Des centaines de milliers de citoyens refusent que l’on impose dans leur véhicule des éthylotests dont le seul but est de maximiser les profits des fabricants », ajoute la Ligue de défense des conducteurs, qui n’entend pas défendre les chauffards alcoolisés mais dit « Stop à la répression absurde ».

La plupart des conducteurs perçoit cette mesure comme un nouvel outil de répression, et non de prévention.

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Le 13 février 2013, le Conseil National de Sécurité Routière donne son avis, en deux temps contradictoires.

Dans un premier temps, le matin, les experts ont émis une recommandation en faveur de l’obligation pour chaque conducteur d’en posséder un dans son véhicule.
La commission « alcool, stupéfiants, vitesse » du CNSR recommande de « maintenir l’obligation de possession d’un éthylotest par les conducteurs d’un véhicule motorisé, en l’étendant aux conducteurs de cyclomoteurs, après la période de mobilisation et d’évolution de la norme NF ».
Surtout, cette commission propose également de « rendre effective la sanction initialement prévue pour la non possession d’un éthylotest après la période de mobilisation et d’évolution de la norme NF  ».
Mais il ne s’agit que d’une recommandation, un avis consultatif.

Dans un second temps, lors d’un vote en assemblée plénière, le CNSR n’a pas complètement suivi ce premier avis.
Certes, le CNSR recommande au ministre de l’Intérieur de favoriser l’acquisition d’éthylotests par les conducteurs. Mais il recommande aussi que leur absence en cas de contrôle routier ne soit pas verbalisée d’une amende de 11 euros. Selon le président du CNSR, cette mesure ne pourra être rendue obligatoire pour l’instant dans la mesure où la fiabilité des éthylotests mis sur le marché est encore sujette à caution et pas encadrée par des normes réglementaires.
Ce qui équivaut à entériner la situation actuelle…

Le CNSR recommande également de décréter les problèmes liés à la surconsommation d’alcool « grande cause nationale » en 2014 et d’augmenter la prévention face aux comportements dangereux en la matière.

Mais encore une fois, tout cela n’est qu’une recommandation du CNSR.

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Le 15 février 2013, dans un entretien avec le quotidien Le Parisien-Aujourd’hui en France, le ministre de l’Intérieur Manuel Valls indique que, pour lui, « il n’y a pas d’éthylotest obligatoire et encore moins de sanctions« . L’alcool est « responsable de 31 % des morts sur la route« , rappelle-t-il. « Mais personne ne peut croire qu’on peut faire reculer ce chiffre en verbalisant les conducteurs d’une amende de 11 euros pour non-possession d’un éthylotest d’autoévaluation« .

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Plus de trois personnes meurent chaque jour sur la route en France dans des accidents liés à l’alcool.
Dans les accidents de voiture où l’on relève un taux d’alcool positif, près de 70 % des personnes tuées sont des conducteurs ayant bu plus que de mesure, et 16 % sont leurs passagers. La nuit, l’alcool est présent dans près d’un accident mortel sur deux.

L’alcoolémie au volant et au guidon est, depuis plusieurs années, la première cause des accidents mortels de la circulation.
Il ne fait aucun doute que la lutte contre l’alcoolémie des usagers de la route doit figurer parmi les priorités d’une politique contre la mortalité routière.

Mais la mesure décidée par le gouvernement Fillon sur ordre du président Sarkozy s’avère à la fois illisible et inefficace.

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Illisible et inefficace car le grand public, pourtant majoritairement convaincu de l’utilité de la lutte contre l’alcool au volant, se perd dans les modalités d’application, les dates d’entrée en vigueur, les reports…

La dissociation chronologique entre l’obligation de se doter d’ un alcootest et la sanction de l’absence de celui-ci est source de confusion.
Il aurait mieux valu, à l’instar d’autres mesures précédentes, commencer par une phase d’équipement conseillé, avec une démarche d’information, avant de passer à une phase d’équipement obligatoire, immédiatement sanctionné.

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Illisible et inefficace car la plupart des usagers français s’applique à n’observer que la stricte obligation et s’avère perdue entre l’obligation de détenir un éthylotest par véhicule et le conseil d’en avoir deux, afin d’en détenir toujours un à présenter aux forces de l’ordre – mais sans s’en servir, on appréciera l’ironie de la situation.

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Illisible et inefficace car l’obligation de conserver un alcootest valide dans son véhicule n’implique pas pour autant l’obligation de s’en servir, ni même l’incitation à l’utiliser.

Les personnes qui ne boivent jamais d’alcool (il y en a) ne se sentent pas concernées, voire se sentent brimées.

A l’inverse, les consommateurs chroniques savent très bien qu’ils prennent le volant (ou le guidon) avec une dose plus ou moins importante d’alcool dans le sang. S’ils conduisent tout de même, parfois depuis des années, tout en sachant parfaitement qu’ils prennent un risque, ce n’est pas d’avoir un alcootest dans leur boîte à gants qui changera leur comportement.

Quant aux usagers fortement alcoolisés de façon ponctuelle, l’effet euphorisant de l’alcool les rend insensibles à la logique rationnelle. Même s’ils savent qu’ils sont en alcoolémie positive, ils se sentiront toujours en état de conduire et auront au contraire tendance à vouloir défier la loi.

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Illisible et inefficace car le décret du 28 février 2012 impose cette obligation à tous les véhicules terrestres à moteur, sauf les cyclomoteurs, c’est-à-dire les deux-roues motorisés de 50 cm3 et moins.
Paradoxe car cette catégorie de véhicules est justement la plus concernée par les accidents mortels avec alcoolémie positive !

En 2011, dans les accidents mortels, la part des conducteurs de cyclomoteurs ayant une alcoolémie positive est environ quatre fois plus élevée que dans  l’ensemble des accidents mortels.
La part des cyclomotoristes alcoolisés observée en 2011 dans les accidents mortels (38%) est la plus élevée, tous conducteurs confondus.

Que penser d’une mesure qui exclut de son champ d’application la population la plus concernée par le problème qu’elle est sensée résoudre (ou aider à résoudre) ???

Un aparté sur cette mortalité de cyclomotoristes en état d’ébriété.
On a souvent tendance à croire que ces accidents mortels en scooter est le fait de la tranche de population qui conduit en grande majorité ces cyclos, autrement dit les adolescents (entre 14 et 18 ans) et les jeunes adultes (18-25 ans). Parce que l’on se dit que cette population recense la plus forte proportion de conduite à risques, notamment avec des alcoolisations ponctuelles, occasionnelles (festives) mais massives, et parfois en association avec des stupéfiants qui en multiplient les effets négatifs sur la conduite.

Cela arrive, c’est vrai.
Mais en fait, les conducteurs concernés par une alcoolémie positive sont les 25-44 ans (43% des conducteurs de cyclomoteurs alcoolisés) et les 45-64 ans (24%), selon le bilan ONISR pour 2011.

A l’inverse, le décret du 28 février 2012 s’applique également à une catégorie à laquelle personne n’avait pensé : les véhicules agricoles !
On est là plutôt dans l’anecdote amusante, mais il s’avère que ce sujet a fait l’objet d’une question écrite du sénateur Daniel Laurent (Charente-Maritime – UMP) en juillet 2012, qui attire l’attention de M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt sur cette disposition inadaptée aux tracteurs agricoles (conditions de stockage, conducteurs multiples, circulation…).
Trois mois plus tard, réponse du ministère de l’Intérieur : « Au-delà du large périmètre couvert par cette mesure, puisqu’elle concerne tout conducteur de véhicule à moteur à l’exception des cyclomoteurs, il appartiendra aux forces de l’ordre, auxquelles des instructions seront données, de veiller à son application avec le discernement requis, à l’égard notamment des conducteurs d’engins agricoles. »
En clair, les conducteurs d’engins agricoles seraient dispensés de cette obligation.

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Illisible et inefficace car les éthylotests qui doivent servir à la détection de l’alcoolémie positive ne sont pas toujours au point.

Six des 12 modèles d’éthylotests chimiques et électroniques testés par le magazine de défense des consommateurs Que Choisir (n°510 de janvier 2013) se sont révélés défaillants, indiquant une alcoolémie inférieure à la limite légale alors qu’elle la dépassait.
Sur les 12 éthylotests évalués (quatre chimiques, huit électroniques), « cinq sont à éviter absolument (trois électroniques, deux chimiques) et un sixième (un chimique) se révèle très mauvais. Concrètement, ils vous indiquent que vous pouvez prendre le volant alors que vous ne devriez pas le faire », écrit le magazine.

Ces résultats viennent confirmer ceux de l’hebdomadaire Auto Plus, publiés mi-décembre 2012.
Le 20 décembre 2012, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a d’ailleurs annoncé le retrait du marché de plus de 400.000 éthylotests chimiques ou électroniques jugés non conformes et dangereux, après une vaste enquête menée dans 144 établissements de fabrication, d’importation ou de distribution, notamment sur internet.

Comme Auto Plus, Que Choisir constate que les équipements électroniques sont plus fiables que les chimiques, pour lesquels « on se retrouve face à un dégradé difficile à interpréter », et que la norme NF garantit plus de fiabilité que les appareils n’en disposant pas.
Certes, le décret prévoit bien que l’éthylotest « homologué » doit répondre aux spécifications des normes X 20-702 ou 20-704. Et le marquage NF (norme française) garantit le respect de ces normes. Mais un éthylotest peut aussi arborer le sigle NF et ne plus respecter la norme !

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Illisible et inefficace car même les éthylotests efficaces ne le sont pas en toutes circonstances.

Le froid impacte sur les résultats des éthylotests chimiques : « le réactif semble inhibé par des températures négatives, mais il suffit de réchauffer l’éthylotest dans ses mains pour qu’il redevienne utilisable », selon le magazine Que Choisir.
De fait, même l’alcootest Contralco (le seul efficace parmi les chimiques) donne une majorité de faux positifs avec une température ambiante de -5°C.

Ces éthylotests chimiques sont conçus avec une plage conseillée d’usage de 10 à 40 °C et pour une utilisation optimale à 22°C. Une température rarement atteinte en France métropolitaine au moment où on utilise en général un alcootest, c’est-à-dire en fin de soirée, voire au beau milieu de la nuit…
Avec une température ambiante de 10°C, seul un éthylotest chimique (le Contralco) sur les quatre testés fonctionne correctement et seulement cinq des huit éthylotests électroniques.
Les choses s’aggravent encore par -5°C, où aucun éthylotest chimique ne fonctionne bien et où seulement deux électroniques font le boulot.
Et par 40°C ambiants, seul le Contralco s’avère encore d’une certaine efficacité.

Et on ne parle là que d’usage !
Le stockage de ces équipements chimiques doit se faire à une température maximale de 40°C pour les chimiques et 55°C pour les électroniques.
Que ce soit dans l’habitacle d’une voiture laissée en plein soleil pendant une demi-journée ou sous la selle d’une moto en été, on avoisine plutôt les 60 à 80°C… Autant dire que les réactifs chimiques seront ensuite inopérants.

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Illisible et inefficace pour les motards.

Certains disent qu’un alcootest est inutile car « les motards ne boivent pas », tant la conduite d’une moto est incompatible avec l’alcool.
On est là dans le cliché, au même titre que  le mythe du motard qui prend un soin méticuleux et compétent de sa moto.

En fait, la présence d’alcool chez les conducteurs de motos impliqués dans les accidents mortels varie depuis 2000 selon un taux entre 20 et 25% des accidents.

Ce taux a atteint 24,5% en 2011 (son plus haut niveau depuis 2000), en hausse de 3,9% par rapport à 2010 alors que ce niveau est stable pour l’ensemble des conducteurs.
Concrètement, sur 787 accidents mortels impliquant au moins une moto en 2011, on a pu mesurer l’alcoolémie sur 617 conducteurs (78,4%) et 151 d’entre eux (conducteurs de motos) étaient en alcoolémie positive. Ils sont d’ailleurs le plus souvent la première victime de cet état alcoolique.
Cela fait quand même dans les 150 motards plus ou moins bourrés qui meurent chaque année…

Seulement 150, me direz-vous. Epiphénomène. Quantité négligeable.
Mais ça, c’était pour les accident mortels.

Si on regarde les accidents corporels de moto, toujours en 2011, il y a eu 16.090 conducteurs de moto impliqués, dont on connaît l’alcoolémie pour 81,6% d’entre eux.
Sur ces 13.134 motards accidentés, 744 étaient en alcoolémie positive.
Cela fait tout de même plus de deux motards alcoolisés et accidentés chaque jour de l’année au niveau national…

Et encore, cela ne concerne que les motards accidentés.
Combien de motards roulent chaque jour sur nos routes avec plus de 0,5 gramme d’alcool par litre de sang ?

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Dernier élément, plus indirect quant à la sécurité routière.

Le traitement des éthylotests usagés constitue un problème sérieux en raison d’une substance toxique qu’ils contiennent en très faible quantité, le dichromate de potassium, de la famille du chrome VI ou chrome hexavalent.
Un éthylotest en contient 2 à 4 milligrammes, soit moins du centième de la dose mortelle pour un adulte (il faut un demi-gramme pour tuer une personne), mais ce composant demeure toxique à n’importe quelle dose.

Si l’usage dans des conditions normales d’un éthylotest n’est pas en soi dangereux, l’élimination d’éthylotests usagés en grande quantité dans des conditions non appropriées pourrait conduire à des impacts sur la santé ou l’environnement.
Or on estime à 30 millions le nombre d’éthylotests utilisés chaque année, soit 60 à 120 kg de dichromate de potassium.

Aussi est-il envisagé de les collecter après usage via une filière spécifique.
La filière de déchets la plus adaptée à ce type d’équipement serait la filière de responsabilité élargie au producteur (REP) des déchets diffus spécifiques (DDS) des ménages, créée début 2012 pour collecter les déchets ménagers issus de produits présentant un risque pour la santé et l’environnement tels que des solvants, peintures, vernis, colles, diluants, extincteurs.

La ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie a demandé à l’INERIS de caractériser plus précisément les dangers présentés par les éthylotests en fin de vie, afin d’étudier l’opportunité d’inclure les déchets d’éthylotests dans cette filière REP.

6 thoughts on “Alcootest : l’échec annoncé”
  1. Bonjour Fabien,
    Premier message (mais pas premier passage) sur votre site que je trouve particulièrement bien documenté et riche en informations. Cette article est très interressant et me conforte dans l’absurdité de ce texte de loi.
    Pour moi, il n’apporte rien ; Les conducteurs soucieux de leur état se contrôlent déjà à l’heure actuelle ou prenne leurs dispositions pour ne pas se déplacer sous l’emprise d’une trop forte consommation d’alcool. Et les personnes ne se souciant guère des risques et/ou des sanctions ne se décourageront pas de prendre le volant/guidon uniquement par la présence d’un éthylotest dans leur boite à gants.
    Je pense que dans ce cas, au delà de l’information, il faut mettre plus de contrôles sur le bord des routes pour voir le nombre de conducteurs ivres chuté. Je suis désolé de constater que nos élus fassent des lois qui peuvent être considéré comme sévère par exemple : le téléphone portable au volant, je trouve cette pratique hypra dangeureuse. Maintenant, je constate que les forces de l’ordre ne les sanctionnent que très rarement. On tombe dans ce cas dans l’absurde, des règles assez dures avec aucune application derrière. Je préfererai des sanctions moins lourdes mais des contrôles très très fréquents.
    Pour en revenir à ce texte, on a l’impression qu’en finalité, on va contrôler la présence du test plutôt que l’état d’ivresse. Donc, aujourd’hui, nous ne sommes pas capable de mettre les contrôles qui vont bien pour faire baisser le nombre de blessés et tués sur nos routes et demain il y aura des contrôles pour savoir si les gens ont bien acheté le produit que nous leur avons imposé.
    Ou au contraire, pas plus de contrôle et l’état aura bonne conscience en se disant qu’il a fait un geste dans la lutte contre la mortalité routière.

    1. téléphone au volant, c’est plusieurs milliers de PV par an…contrôle alcoolémie, plusieurs millions…
      dans tous les cas, l’éthylo est loin d’être un échec, au contraire, le CNSR du 13 février l’a annoncé il est étendu aux cyclomoteurs et son obligation de possession interviendra dans quelques mois.
      le temps que tous les magasins soient provisionnés et la norme légèrement modifiée pour éviter les faux négatifs.

      1. Je ne sais pas d’où vous détenez ces chiffres et quelle conclusion vous en tirez. Cela étant, force est de constater que pour l’alcoolémie, je n’ai subi que deux contrôles en 20 ans de permis. Les personnes dans mon entourage connaissent approximativement la même statistique soit 1 contrôle tous les 7/10 ans en moyenne.
        Pour les portables, je me suis amusé un soir (vers 18h30, sortie de bureau) à attendre à un feu et j’ai pu constater qu’un grand nombre de conducteurs étaient la main à l’oreille avec le téléphone portable au volant.
        Si vos données sont exactes, je persiste sur le fait que les conducteurs ne sont pas assez sanctionnés (et sensibilisés) sur la dangerosité de leurs actes et à la place de millions de PV, il faudrait tendre vers le milliard.
        La sanction vitesse a été automatisée à outrance et a sans nul doute apportée ses bienfaits. maintenant, je constate que les mauvais comportements ne sont pas assez sanctionnés, que la voiture est le prolongement de son « chez soi » et que la route est de moins en moins une zone de partage.
        Pour finir, le conseil national de la sécurité routière n’a fait à ce jour que des prescriptions et le gouvernement sera libre de les suivre ou non.
        Cet organisme a, en effet, fortement conseillé la possession d’un éthylostest dans chaque véhicule mais a demandé à ce que la sanction n’existe pas, autant dire que ce n’est pas obligatoire ! Et j’en reviens à l’idée que via un auto-contrôle on n’empêchera pas les conducteurs irresponsables de trainer sur les routes.

  2. Merci pour ce super article !
    Je pense aussi qu’il y à , comme au niveau du CT moto, des fabricants qui ont bien « poussés » voir « orientés » les débats pour que ce type de mesure prenne forme…..
    Quand on sait ce que ça rapporte… ( voir motomag pour le chiffrage )
    Le fait est,qu’encore une fois, on ne pense pas les mesures de bout en bout et on « tombe des nues » quand on nous annonce les énormes problèmes de recyclage que cela pose.
    Je trouve que les « technocrates décideurs » devraient faire le travail avec plus de rigueur.

  3. Encore un article très intéressant!

    J’ai été étonné par la partie sur « l’alcoolisme motard », étant avant sa lecture très en accord avec la phrase « Certains disent qu’un alcootest est inutile car « les motards ne boivent pas », tant la conduite d’une moto est incompatible avec l’alcool. ». Pourtant j’étais d’accord avec le faux « mythe du motard qui prend un soin méticuleux et compétent de sa moto » pour des raisons de connaissances techniques et financières (la moto est souvent un deuxième moyen de transport ponctuel).
    Bref, en y pensant c’est logique que l’alcoolisme au guidon touche également les motards mais avec chiffre à la clef ça pose bien le contexte.

    Concernant l’article dans son ensemble, je suis tout à fait d’accords sur les points soulevés, la part de conducteur se sachant soul, les problèmes de stockage. Je n’étais en revanche pas conscient des problèmes liés aux déchets générés.

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