Un peu de culture, avec un tour d’horizon des travaux sociologiques, ethnologiques et ethnographiques sur la population motarde.

Suite à un entretien en octobre 2006 avec Denis Berger, un étudiant sociologue qui prépare son mémoire de mastère de sociologie sur la population motarde, intitulé « Les motards à l’âge adulte, Normes et pratiques d’un groupe déviant » nous avons discuté de l’état de la recherche sociologique, ethnologique et anthropologique française sur les motards.
Du coup, j’ai fait un petit tour d’horizon sur le web.

Ce tour d’horizon n’est ni exhaustif, ni sélectif. J’ai choisi de référencer tout (ou devrais-je dire, le peu) que j’ai pu trouver comme études sur la moto dans le domaine des sciences sociales, toutes disciplines confondues. N’étant pas spécialiste en sciences sociales, je ne porte notamment aucun jugement, positif ou négatif, sur le fond de ces travaux.

On peut déjà commencer par lire les articles de Denys, publiés depuis fin 2005 au rythme d’environ un par mois sur son blog Nuage Ocre, répliqué depuis janvier 2007 sur son site Sociomotards.
Il sont regroupés dans son mémoire de master de sociologie, disponible ici (84 pages).

Ensuite, une première étape par l’article de Wikipédia sur les motards, qui adopte une approche franchement sociologique.

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Un des travaux les plus connus en la matière, le mémoire de mastère de sociologie de Frédéric Völker en 2002, intitulée « L’Existence sociale des motards« .
Le boulot est intéressant, toujours instructif, mais je trouve personnellement que ses références datent un peu, on a l’impression de se retrouver dans les années 1980.

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Plus intéressant, le travail de Carole Soriano, « Les motards, étude d’un groupe d’usagers de la route« , mémoire de maîtrise de sociologie sous la direction d’Yves Gilbert, université de Perpignan, 1999.

Etudiante en mal de sujet, elle a pris contact avec le milieu motard local, l’antenne FFMC 66 en l’occurrence, sur la demande de son directeur de recherche. Accueillie à bras ouverts, rapidement enrôlée au bureau de l’association, elle a entretenu des relations privilégiées avec une informatrice motarde, participé en passagère aux activités du groupe, les manifestations en particulier, et réalisé une vingtaine d’entretiens.

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Le sociologue qui s’intéresse actuellement de plus près au monde motard est François Oudin, doctorant en ethnologie à l’université Paul Verlaine de Metz.

On pourra lire un résumé de sa thèse sur la mythologie de « la passion de la moto« .

Il évoque l’intérêt de ce sujet lors d’une journée de conférences et d’interventions d’ethnologues et doctorants à l’université de Metz, dans une allocution prononcée à cette occasion.

Il a également publié deux articles d’anthropologie sur le site du Portique (revue de philosophie et de sciences sociales), l’un en avril 2005 sur « Les motards comme figure du risque et de l’incivilité ? » et l’autre en janvier 2005 sur « Motard(e) et migration(s): genre et migration comme axes interrogeant l’anthropologie des motards« .
On pourra reprocher à ces deux articles d’abuser un peu du jargon sociologique, ce qui les rend difficilement accessibles au commun des motards mortels.

François Oudin a également publié les articles suivants, non disponibles en ligne:
– « Les motards comme figure du risque et de l’incivilité », Les cahiers de recherche 2, Editions du Portique, Strasbourg, 2005 ;
– « Corps et moto », dans le « Dictionnaire du corps », ouvrage collectif (direction : Bernard Andrieu), L’Harmattan, CNRS éditions, Paris, 2006.

Il a par ailleurs participé à plusieurs colloques et prononcé les interventions suivantes:
– « L’engagement corps/objet au sein de la « passion » de la moto », au colloque international « In-corporer », GERCO, 2006, éditions l’Harmattan, sous la direction de Monique Manoha, collection « Le mouvement des savoirs » dirigée par Bernard Andrieu.
– « Entre fête et loisirs : ethnographie du quotidien des passionnés de moto », au colloque international « La fête au présent. Mutations des fêtes au sein des loisirs. », Mutations des Territoires en Europe (UMR 5045-CNRS).
– « Une anthropologie du plaisir chez les motards : de l’anecdote à la réalité de terrain », au colloque « Ethnologie des gens heureux », LAMIC-UNSA (Université de Nice, Sophia Antipolis), 2007.

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Autre travail que j’ai trouvé, celui de François Portet, intitulé « L’argent de la moto, créer une richesse ou accepter la pénurie« , publié dans la revue d’ethnologie « Terrain » ( n°23, p 115-122) en 1994.
Du même auteur, « Moto et motocyclisme : l’amour de l’objet et le goût du risque », publié en 1998 dans l’ouvrage collectif « Passions ordinaires », éditions Hachette, sous la direction de Christian Bromberger.
Ces deux textes révèlent un contenu assez différent. Le premier traite spécifiquement des questions d’argent à la fois pour les membres du club, quasi-exclusivement de jeunes ouvriers et employés aux revenus modestes, et entre eux. Le second décrit de manière plus globale, et plus ethnologique, la passion de la moto, la vie au sein du club, le rituel des affrontements lors de la concentration.

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Quant aux ouvrages, thèses, mémoires et autres travaux publiés sous forme papier mais non disponibles en ligne, on peut citer la thèse de sociologie rédigée par Lucas Peetroons en 2003, « Etre motard à Bruxelles, pratiques et représentations », publiée par l’Université libre de Bruxelles (105 pages).
Résumé par l’auteur: « L’objet de cette étude concernait tous les engins motorisés à deux roues faisant l’objet d’une utilisation sur la route. Mon but était de découvrir et d’étudier les coutumes et les traditions liées à ces groupes, ainsi que la sociabilité et la cohésion sociale que l’on peut y trouver. Je me suis également intéressé à déconstruire les stéréotypes ou préjugés que l’on peut retrouver sur les motards et le monde de la moto en général. Ce mémoire m’a donné la possibilité d’étudier « le monde de la moto » de l’intérieur afin de percevoir ce que les principaux intéressés pensent d’eux-mêmes et de leurs pratiques. »

Citons aussi « La machine et la chute. Mutations de l’imaginaire motard », écrit par Pascal Duret et Georges Vigarello, article publié par la revue Ethnologie française en 1991 (vol. 21, n°3), Presses universitaires de France.
Résumé du contenu: « Evolution de la manière dont les commentateurs des accidents sur les circuits de moto sont passés de l’acceptation d’une violence héroïque à la notion de violence inutile. »
On en salive d’avance !

Si vous connaissez d’autres travaux, n’hésitez pas à en parler dans vos commentaires en réponse à cet article.

6 thoughts on “La sociologie du motard”
  1. en fait, à lire certains articles , tout se résumerait à savoir ,comme dans la cour de récré : »qui c’est qu’a la plus grosse », franchement même si ce mécanisme est indéniablement à l’oeuvre…. ça me parait insuffisant comme analyse que je trouve un peu » psychologie au petit pied… »

  2. c’est bien sûr intéressant de voir « disséquées » nos, ma, conduite parfois à risque… avec tous les ressorts inconscients qui sont actionnés y compris chez les automobilistes!devenir plus conscient des mécanismes à l’oeuvre aide-t-il à conduire plus sûrement? je suis un peu dubitatif, d’autant que la remarque sur le déplacement de la violence dans les sociétés est aussi inquiètante et malheureusement illustrée par l’actualité récente en Suède.
    amicalement
    Marco

  3. Bonjour. Je viens de lire le travail de Völker, tel qu’il est mis en ligne sur cet article, (dont je remercie encore largement l’auteur, qui nous donne là une autre occasion, passionnante, de se pencher sur l’univers de la moto). Pouvez-vous développer (un peu) et en des termes abordables en quoi « …Völker ne produit quoi que ce soit de pertinent, etc… »? Par ailleurs, je vais essayer d’aborder les ouvrages de H.Becker et F.Portet que vous évoquez.
    Merci d’avance.

  4. Concernant la sociologie de la moto, j’ai publie dans la Revue internationale de Psychosociologie 2003/20 (Volume IX) un article intitule « Prise de risque et recherche des limites : exemple de la conduite sportive à moto ». Je pense qu’il peut etre utilement ajoute a votre liste.
    Amicalement,
    N. Chr.

    – – –

    Réponse

    Le souci est que cet article n’est pas accessible gratuitement en ligne.
    Voir
    http://www.cairn.info/resume.php?ID_ARTICLE=RIPS_020_0121
    http://cat.inist.fr/?aModele=afficheN&cpsidt=15041612

  5. Salut Fabien,

    avant de me plonger dans le mémoire du gars Denis, une petite intuition/impression au passage sur la sociologie motarde.

    Pour le très peu que j’en sais (permis tout frais), je ressens pas mal de similitudes entre le monde des motards et des rollers (que je connais pas mal pour avoir encadré des randos roller à Toulouse et toujours pratiquer).

    On a des groupes bien distincts les uns par rapport aux autres : sans parler des motards (tu retrouveras des constantes…), en roller, on a (à très grand trait) :
    – les quadeurs qui sont une élite, avec un grosse technique, et une pratique à risque (catch des voitures et motos,…); ils pourrissent l’encadrement des randos et râlent contre toute consigne…
    – les vitesseux (habillés très moche, comme des cyclistes, habitudes de compète, assez isolés des autres, pratique non ludique)
    – les randonneurs : familial, grosse présence de l’ingénieur informaticien dans ce groupe et ds le roller inline en général, présents aussi dans le staff des randos…
    – etc.

    L’intéressant est que certains de ces groupes se voient comme une élite qui ne consent que rarement à communiquer avec les autres (vécu : certains purs quadeurs toulousains ne serrent la pince qu’aux autres quadeurs, donc il faut des quads pour avoir droit à un serrage de pince). Toute ressemblance avec certains motards… (voir les commentaires sur les sujets de forum du type, « quelle moto acheter ? »)

    Le point commun me semble aussi venir de ce que, une pratique pleine de la moto, a fortiori du roller, n’est pas possible ds un parfait respect des règles (un patineur en ville devrait rester sur les trottoirs, ce qui est ballot). roller et motards = déviants.

    Également, une pratique roller/moto qui relève de l’exutoire par rapport à un quotidien considéré comme morne, qui du coup empêche de ressentir que comme pratiquant d’une passion minoritaire, on est un représentant du groupe motards /roller : quand je pourris un type en voiture (un piéton si je suis patineur), je me soulage mais je contribue à la mauvaise image que la majorité a de mon groupe.
    Du coup, j’ai l’impression, dans certaines interventions (sur les forums notamment), de retrouver des points de vue que je ne m’explique pas :
    ex : je suis fier de ma passion (roller ou moto donc) mais je crache sur ceux qui voudraient la faire partager (staffeurs de rando, FlatFab que l’on accuse d’être moralisateur,…), et je crache en même temps sur ceux qui n’y connaissent rien.

    Mon propos reste caricatural, mais je suis frappé par les points communs. Désolé si petit HS.

    – – –

    Réponse

    Pas de HS, la comparaison est intéressante.

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